Pour l’instant, le seul indicateur qui semble pertinent pour prédire l’efficacité d’une immunothérapie basée sur l’utilisation d’un anti PD-1 ou anti PD-L1 est la quantité et la nature des cellules immunitaires infiltrées dans la tumeur. En effet, les anticorps permettant de relâcher les freins immunitaires imposés par la tumeur (nivolumab, ippilimumab…) semblent plus efficaces si des cellules immunitaires, potentiellement aptes à s’attaquer à la tumeur, sont déjà sur place. Or pour disposer de cette information, les médecins doivent réaliser une analyse d’échantillons tumoraux et donc réaliser un prélèvement, ce qui est rarement anodin. Pour faciliter cette étape, des chercheurs français ont voulu voir s’il était possible de remplacer l’analyse d’un échantillon par la « simple » observation d’une image de scanner.
Pour parvenir à ce résultat, les chercheurs ont compté sur la capacité d’apprentissage d’une machine à laquelle on montre de nombreux exemples. En l’occurrence, les chercheurs ont généré ces exemples en mettant en correspondance des images de scanner et des données moléculaires obtenues auprès de patients participants à un essai clinique de médecine personnalisée et à qui étaient proposés les fameux inhibiteurs de checkpoints (anti PD-1 ou anti PD-L1). Les données moléculaires consistaient en une mesure du niveau d’expression du gène CD8b, spécifique des lymphocytes potentiellement anticancéreux, dans les échantillons tumoraux prélevés chez tous ces patients. La quantité de lymphocytes, révélée par le niveau d’expression du gène CD8b, a ainsi été systématiquement mise en regard des caractéristiques de l’imagerie. Et l’algorithme est parvenu à identifier les caractéristiques qui étaient associées à une forte infiltration de lymphocytes ou celles qui, au contraire, ne présageaient que d’un désert immunitaire.
Pour valider le bon apprentissage de leur machine, les chercheurs l’ont mis au défi auprès d’autres cohortes de patients. Invariablement, l’analyse par l’algorithme des images de scanner permettait de distinguer les patients dont la tumeur était riche en lymphocytes de ceux qui étaient au contraire porteurs d’une tumeur faiblement infiltrée. Quand les chercheurs ont mené l’expérience auprès de patients recevant les immunothérapies, les résultats ont montré que certains profils d’imagerie (l’examen d’imagerie ayant été réalisé avant le traitement) étaient clairement associés à une régression tumorale après 3 à 6 mois de traitements. Ces « signatures radiomiques », telles que les appellent les chercheurs, étaient par ailleurs aussi prédictives d’une meilleure survie.
Pour l’heure, les chercheurs sont parvenus à montrer qu’il était possible de prédire un phénomène biologique très subtil grâce à de simples examens d’imagerie pour peu qu’ils soient confiés à une intelligence artificielle bien élevée. Si l’outil est déjà intéressant en tant que tel, les chercheurs prévoient d’en affiner les compétences en lui présentant des cohortes de patients plus spécifiques, en termes de localisation cancéreuse par exemple.
R. D.
Source : Sun, R. et a ; A radiomic approach to assess tumou-infltrating CD8 cells and response to anti-D-1 or anti-PD-L1 immunotherapy : an imaging biomarker, retrospective multicohort study ; Lancet Onclogy ; 14 aout 2018