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24 novembre 2016

Cancers de la prostate : la quête du biomarqueur

L’évaluation du niveau d’agressivité des tumeurs prostatiques est une des questions centrales de leur prise en charge. Si les outils sont toujours plus nombreux pour caractériser ces tumeurs, LES biomarqueurs qui permettront de distinguer les patients devant recevoir un traitement intensif de ceux qui, au contraire, ne nécessitent qu’une surveillance active, n’ont pas encore été identifiés. Mais les chercheurs sont à l’ouvrage et des résultats commencent à émerger.

Chaque année, plus de 55 000 nouveaux cas de cancers de la prostate sont diagnostiqués en France.

En dépit d’un taux de survie à cinq ans élevé (94 %), ces cancers sont responsables d’environ 8 700 décès par an. Si les cancers de la prostate de stade avancé sont souvent complexes à prendre en charge, les cas diagnostiqués précocement bénéficient d’une prise en charge très efficace tout en s’appuyant sur un plan de traitement d’intensité modérée. Lorsque le cancer est encore localisé et peu agressif, il est même possible de privilégier une surveillance, quitte à déclencher des traitements dès les premiers signes d’alerte. Pour ajuster au mieux la prise en charge, les médecins doivent disposer d'indicateurs permettant d'établir le plus précisément possible le degré d'agressivité de la tumeur de chaque patient.

Les premières approches

Au début des années 90, le dosage du PSA dans le sang est apparu comme LE biomarqueur objectif, facilement quantifiable. Cet « antigène prostatique spécifique » est une protéine sécrétée par la prostate ; son taux sanguin est associé au niveau d'activité de cette glande, à sa taille ou à la présence d’une tumeur plus ou moins agressive. Si le PSA est donc bien, comme son nom l’indique, une protéine spécifiquement produite par la prostate, on sait aujourd’hui que son taux sanguin n’est pas spécifique de la présence d’une tumeur1 une augmentation significative du taux de PSA peut aussi être liée à une inflammation, une infection urinaire, une activité physique intense, des rapports sexuels récents, voire même un long trajet en voiture !

Moins simples à mettre en œuvre mais plus informatives, les techniques d’imagerie ont beaucoup progressé ces 20 dernières années. L’imagerie par résonance magnétique (IRM), en particulier, permet aujourd’hui de localiser précisément la tumeur, ou plutôt les foyers tumoraux, comme le précise Nicolas Barry Delongchamps, médecin urologue à l’Institut Cochin et chercheur au sein de l’Institut Necker Enfants Malades (INEM, Centre de médecine moléculaire). Les cancers de la prostate sont en effet souvent constitués de plusieurs sites tumoraux qui évoluent indépendamment les uns des autres et rendent plus complexe l’établissement d’un pronostic : tous les foyers n’ont pas nécessairement la même agressivité. Au fil des années, différentes variantes de l’IRM se sont développées, chacune permettant d’observer sous un angle particulier la prostate et la/les tumeur(s)2. « Ces IRM dites multiparamétriques sont aujourd’hui des outils incontournables pour localiser les tumeurs prostatiques et évaluer leur degré d’agressivité », explique le spécialiste des cancers de la prostate. « Mais il nous manque toujours des informations d’ordre moléculaire, qui nous permettraient de mieux prévoir l’évolution progressive de la maladie ainsi que, pourquoi pas, sa sensibilité aux différents traitements chez chacun de nos patients ».

Histoire naturelle et fusions de gènes

Pour tenter d’y voir plus clair dans ce que médecins et chercheurs appellent l’« histoire naturelle » des cancers de la prostate, Nicolas Barry Delongchamps se penche, depuis environ trois ans, sur une anomalie génétique bien particulière. Chez plus de la moitié des patients, différentes équipes de recherche ont pu observer que deux gènes normalement distincts, TMPRSS2 (T) et ETC (E), se trouvaient fusionnés suite à un déplacement survenu dans l’ADN des cellules cancéreuses. Mais ce déplacement ne se fait pas toujours de la même manière et ne donne donc pas toujours naissance au même gène de fusion « T-E ». « Notre objectif est de comprendre comment chaque version de la fusion T-E agit sur l’évolution de la maladie ou sur sa sensibilité au traitement » explique le médecin-chercheur. En pratique, les choses sont plus complexes : chez un patient, les différents foyers tumoraux ne portent pas nécessairement tous la même fusion T-E… Tout l’enjeu des travaux menés dans le laboratoire de Nicolas Barry Delongchamps et soutenus par la Fondation ARC est donc d’identifier la fusion exprimée dans chaque foyer tumoral, puis d’associer cette information à l’évolution de la maladie du patient. Pour y parvenir, les chercheurs s’appuient sur la réalisation de biopsies guidées par les IRM multiparamétriques afin de prélever des échantillons dans chacun de foyers tumoraux, auprès des 300 patients que l’étude doit inclure.

En parallèle, ces anomalies génétiques sont aussi recherchées dans de simples prélèvements d’urine, qui contiennent des cellules provenant de la prostate. Les chercheurs doivent alors comparer les résultats obtenus grâce à cette analyse à ceux des échantillons tumoraux. Sont-ils concordants ? L’hétérogénéité qui existe entre les foyers tumoraux est-elle observable dans les urines ?

À terme, la prise en charge des patients pourrait être améliorée si les chercheurs parviennent à établir des liens clairs entre la présence des différentes fusions de gènes et les formes plus ou moins agressives de cancers de la prostate. De plus, réaliser cette exploration génétique à partir d’un simple prélèvement d’urine permettrait d’envisager une application encore plus simple de cette avancée, au moment du diagnostic mais aussi plus régulièrement, pour le suivi du patient pendant son traitement.


R.D.

1 Ce manque de spécificité explique en partie que le dosage sanguin du PSA ne constitue pas, selon les recommandations sanitaires officielles, un test de dépistage du cancer de la prostate.
2 Nous présentions un projet d’imagerie appliquée aux cancers de la prostate dans une newsletter en 2014.