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Améliorer le suivi et la prise en charge des adultes qui ont été atteints de cancer pendant l’enfance

Comment estimer l’impact sur la santé à l’âge adulte d’un cancer soigné durant l’enfance ou l’adolescence ? Comment améliorer les pratiques afin de limiter les séquelles des traitements et proposer un suivi adapté à ces personnes ?

Le point avec le docteur Florent de Vathaire (Inserm, Gustave Roussy, Villejuif) et le docteur Charlotte Demoor-Goldschmidt (Inserm, Gustave Roussy, Villejuif et Service d’oncologie hématologie immunologie pédiatrique, CHU d’Angers).

Afin de répondre à ces questions, l’équipe Épidémiologie des radiations, épidémiologie clinique des cancers et survie dirigée par le docteur Florent de Vathaire allie les compétences de médecins - épidémiologistes, pédiatres ou oncologues -, mais aussi d’ingénieurs en physique médicale, voire de sociologues. Son objectif : identifier et modéliser les risques, à l’âge adulte, des traitements suivis pendant l’enfance et contribuer à la mise en oeuvre d’un suivi adapté afin de les prévenir. La Fondation ARC soutient cette équipe à la pointe de la recherche mondiale, sur des projets qui dessinent les recommandations et pratiques à venir. Rencontre avec Florent de Vathaire et Charlotte Demoor-Goldschmidt pour mieux comprendre les enjeux de la recherche en épidémiologie.

Florent de VathaireFlorent de Vathaire, que sait-on aujourd’hui de l’impact d’un cancer de l’enfant sur la santé à l’âge adulte ?

[Florent de Vathaire] Globalement, on sait, aujourd’hui, que le traitement d’un cancer pendant l’enfance augmente, à l’âge adulte, le risque de second cancer ainsi que le risque cardiovasculaire. Cela est dû principalement aux effets à long terme de la radiothérapie et de la chimiothérapie, ce qui explique l’appellation « cancer secondaire » pour un certain nombre de ces seconds cancers. Ainsi, on estime que l’exposition à la radiothérapie durant l’enfance multiplie par dix le risque de l’ensemble des cancers à l’âge adulte. Dans le cas du cancer du sein, le risque est multiplié par vingt, chez les femmes ayant suivi une radiothérapie thoracique pendant l’enfance.

Cependant, il est nécessaire d’affiner nos connaissances et de mieux comprendre la relation dose-effet des traitements – qu’il s’agisse de radiothérapie ou de chimiothérapie - afin de mieux identifier les risques et d’être en mesure d’établir des recommandations pour un suivi personnalisé à l’âge adulte. Cela permettra aussi aux médecins d’adapter au mieux la stratégie thérapeutique afin de limiter les séquelles.

Dans le cadre d’un programme Pop-HaRC de la Fondation ARC1, notre équipe élabore un modèle prédictif de risque de cancers secondaires chez les personnes traitées par radiothérapie pour un cancer pendant l’enfance. Avec l’aide des physiciens de l’équipe, nous reconstituons, à partir des dossiers médicaux des patients traités avant l’an 2000, les doses de radiations reçues sur l’ensemble du corps, et non pas seulement sur la zone traitée, durant la radiothérapie. À partir de ce travail, nous pourrons établir des modèles de prédiction du risque à long terme, très utiles pour évaluer le rapport bénéfice-risque des nouveaux protocoles ou techniques de radiothérapie et organiser le suivi à long terme des patients guéris.

Par ailleurs, toujours dans l’objectif de mieux évaluer le risque afin de mieux l’anticiper ou le gérer, nos recherches intègrent aussi les interactions avec les facteurs génétiques, déterminées dans le cadre d’autres projets de recherche : en effet, tous les patients ne sont pas égaux devant les risques. Certains, de par leur profil génétique, seront plus sujets que d’autres à développer des cancers à exposition égale. Notre objectif est vraiment de parvenir à proposer une stratégie de prévention individualisée, adaptée au risque de chacun.

Peut-on pallier les risques inhérents aux traitements des cancers ?

Pour aller plus loin

Il faut d’abord rappeler que, si les traitements comportent des risques, ils permettent aujourd’hui de sauver près de 80 % des enfants. La balance bénéfice-risque est donc très favorable. Cela étant, il faut parvenir à guérir mieux et à prévenir les risques à long terme des traitements. C’est particulièrement important pour les enfants qui ont toute la vie devant eux.

Les travaux de recherche en épidémiologie permettent de mieux connaître les risques pour mieux les pallier. Ainsi, les résultats obtenus par notre équipe dans le cadre du programme Pop-HaRC de la Fondation ARC, permettront aux radiothérapeutes de mieux évaluer les risques à long terme de la radiothérapie, et, à l’avenir, d’adapter les doses, la stratégie thérapeutique, grâce à une analyse plus fine du rapport bénéfice-risque. Ces résultats pourront aussi donner des arguments scientifiquement établis en faveur de la promotion de techniques moins irradiantes, comme la protonthérapie, encore peu développée en France.

Enfin, très concrètement, nos travaux permettront d’améliorer le suivi des adultes traités pour un cancer durant l’enfance. Dans le cadre du programme Pop-HaRC, nous étudions la faisabilité d’un dépistage du cancer du sein et de la thyroïde chez des patients traités pour un cancer pendant l’enfance ou avant l’âge de 30 ans, dont le traitement comportait de la radiothérapie dont le champ incluait la thyroïde (pour les hommes et les femmes) et/ou les seins (pour les femmes). Ce programme de dépistage a débuté à a fin 2017. L’enjeu est de proposer une organisation efficace pour assurer au mieux le suivi. L’analyse du programme pilote mis en oeuvre, au sein de mon équipe, par Charlotte Demoor-Goldschmidt, intègre également la dimension psycho-sociale, essentielle à la réussite du programme. Il faut convaincre les patients, qui sont guéris et qui sont concernés, de participer au dépistage et parvenir à obtenir leur adhésion à long terme. Ce n’est pas évident : lorsque l’on est guéri d’un cancer, on a parfois envie d’oublier. D’où l’importance de trouver le dispositif le plus juste et le plus éthique afin de parvenir à être efficace et à sauver des vies.

La Fondation ARC soutient plusieurs projets menés au sein de votre équipe : quel regard portez-vous sur son rôle ?

Le rôle de la Fondation ARC est déterminant car les projets que nous menons nécessitent des financements très importants. Ainsi, dans le programme Pop-HaRC, la Fondation ARC finance notamment la reconstitution dosimétrique d’une cohorte de 9 000 anciens patients que nous utiliserons ensuite sur d’autres projets. La Fondation ARC nous permet d’avancer plus vite et de décupler l’impact de nos recherches.

Charlotte Demoor-GoldschmidtCharlotte Demoor-Goldschmidt, quel est l’objectif du projet que vous conduisez sur le Dépistage national des cancers du sein et la thyroïde (DeNaCaPST) ?

[Charlotte Demoor-Goldschmidt] Le projet de recherche évalue la faisabilité du programme de dépistage réalisé selon les recommandations de soins nationales et internationales. En effet, on sait que sans programme dédié, le dépistage n’est pas réalisé. Dans cette étude, nous ne cherchons donc pas à valider des recommandations, mais à évaluer l’organisation du dépistage.

À ce jour, nous avons déjà recensé les personnes concernées par le dépistage, à partir de la cohorte FCCSS (French Childhood Cancer Survivor Study), et les 24 centres impliqués dans l’étude ont commencé à recontacter les anciens patients. Le dispositif testé dans l’étude comporte une première consultation d’information, ou de ré-information, le plus souvent réalisée par les médecins qui avaient mis en oeuvre le traitement oncologique. Celle-ci vise à expliquer les risques liés aux traitements du cancer. Elle peut nécessiter l’intervention de radiothérapeutes et de radiophysiciens pour estimer la dose reçue par les organes. Cette première consultation est suivie d’une deuxième qui oriente les patients vers les professionnels en charge du dépistage des cancers du sein et/ou de la thyroïde.

L’étude cherche à valider l’organisation, à mettre en évidence les freins et les obstacles rencontrés,
et à évaluer si l’adhésion des patients est satisfaisante sur le long terme ou bien s’il faut modifier certaines
modalités du dépistage.

Quels sont les patients concernés par le programme de dépistage ?

Le dépistage du cancer de la thyroïde concerne les patients traités avant l’âge de 30 ans pour tout type de cancer, dont le traitement comportait une radiothérapie ayant irradié tout ou partie de la thyroïde à une dose de 3 grays ou plus. Pour les patients chez qui le dépistage est indiqué, celui-ci débutera cinq ans après la radiothérapie et après l’âge de 18 ans. Le dépistage du cancer du sein concerne quant à lui les femmes âgées aujourd’hui de 25 ans et plus, traitées il y a au moins huit ans avec une radiothérapie qui a irradié tout ou partie du sein ou du bourgeon mammaire, à une dose supérieure ou égale à 10 grays.

 



1. Programme intitulé « Élaboration d’un modèle de prédiction de risque des cancers secondaires survenant après un cancer ou une leucémie de l’enfant. Faisabilité et évaluation d’un dépistage des cancers secondaires du sein et de la thyroïde », sélectionné par le Fondation ARC en 2014 dans le cadre de l’appel à projet Pop-HaRC (Populations à haut risque de cancer : prévention et prise en charge du risque).

Photos : Gustave Roussy | Catherine Jouannet - CHU Angers